Douze œuvres en vue
Lumière sur douze de nos objets les plus emblématiques des Cévennes.
Maison Rouge – Musée des vallées cévenoles présente de très riches collections ethnographiques, historiques, d’arts et traditions populaires sur la société rurale et traditionnelle des Cévennes, du XVIIe siècle au XXe siècle.
Lo brusc ou ruche
Chaque exploitation cévenole possède son rucher de quelques ruches à plusieurs dizaines. Les abeilles ne sont pas seulement élevées pour le miel et la cire qu’elles fournissent, même si dans certaines exploitations le miel représente le seul sucre que l’on consomme. Elles symbolisent aussi la vie et la prospérité du mas.
Dans les hautes vallées, la ruche est directement creusée dans un tronc de châtaignier et couverte d’une lauze de schiste (ruche tronc). Dans les basses vallées, elle est construite en planches de châtaignier et couverte de tuiles romanes ou d’un couvercle en terre cuite.
Vannerie en éclisses de châtaignier
La vannerie d’éclisses de châtaignier est une activité d’homme, réservée aux jours de pluie et aux longues soirées hivernales. Cet artisanat paysan produit des articles essentiellement utilisés sur place. Toutefois des exécutants très habiles peuvent vendre leur production sur les foires, ou l’échanger avec des voisins contre un service rendu.
Certains deviennent vanniers professionnels. Tous les objets sont fabriqués avec des rejets de souches de châtaigniers boscas (non greffés) refendus en éclisses et avec de l’osier. Vers 1930, il y avait encore 35 artisans vanniers à Saint-Laurent-le-Minier.
Vase d’Anduze
Ces vases horticoles, apparus au XVIIIe siècle, ont connu un remarquable succès au XIXe siècle. Dits « vases d’Anduze », ces grands pots vernissés, sur piédouche (petit piédestal), en forme de cloche renversée, ornaient tous les parcs et les orangeraies de France et de Navarre. Ils sont toujours commercialisés et leur forme est inchangée depuis leur création. La collection du musée en compte une trentaine, du XVIIIe au début du XXe siècle.
Bas de soie
La bonneterie, venue d’Angleterre, désigne la fabrication et le commerce d’articles textiles en maille et notamment les chaussettes, bas et la lingerie. Le développement de la bonneterie a été considérable au XVIIIe siècle à Nîmes et dans sa région. La ville a compté, dans sa dépendance, les principales cités bonnetières des Cévennes : Alès, Anduze, Saint-Jean-du-Gard, Monoblet, Lasalle, Sauve, Durfort, Saint-Hippolyte-du-Fort, Ganges, Le Vigan… Avec le développement de la sériciculture, la production des bas de laine ou de coton est progressivement supplantée par celle des bas de soie. Cette fabrication, dont Ganges fut un centre majeur, a assis la réputation des ateliers cévenols, dont les créations, essentiellement tournées vers l’exportation, ont utilisé la soie sous toutes ses formes.
Plaques muletières ou lunas
Partie intégrante du harnachement des mulets, les plaques muletières étaient fixées par trois, une en frontal et deux en œillères, sur la bride. Fabriquées en laiton travaillé au repoussé et gravé, elles sont figurées pour les plus anciennes puis, au XVIIIe siècle, gravées d’une épigraphe qui révèle souvent le caractère bon vivant des muletiers.
La ville du Puy-en-Velay a été un centre important de fabrication de ces lunas. L’usage de ces plaques est tombé en désuétude avec la fin du transport muletier dans la seconde moitié du XIXe siècle, sauf dans les pays de haute montagne (Savoie, Pyrénées). Ces plaques ont quelquefois connu un réemploi comme couvercle ou, munies d’un manche de fer, elles ont été transformées en pelles à braises ou en écumoires. Le musée possède une collection de 110 plaques muletières.
Soles
Les châtaignes sont consommées fraîches, grillées ou bouillies mais la plus grande partie est déshydratée pour une bonne conservation tout l’hiver. Pour cela, la production est apportée dans un séchoir, appelé « clède ». Après une période de séchage de 5 semaines, on procède au décorticage. Plusieurs méthodes existent comme l’utilisation de solas. Les « soles » sont des chaussures à semelle de bois plantées de fiches barbelées en fer forgé, permettant de fouler les châtaignes sèches placées dans une auge. Une fois les peaux retirées, les châtaignes obtenues sont dites châtaignons, châtaignes blanches ou bajanas. On les consomme cuites à l’eau, en soupe, lo bajanat.
Castelet
Dès la fin avril, et en fonction de l’avancement des mûriers, l’éducation des vers à soie monopolise les soins de la maîtresse de maison. Les œufs de bombyx pondus l’année précédente, appelés graines, sont mis à incuber. La femme s’occupe de l’éclosion de la graine, portant les œufs dans un petit sac appelé « nouet » placé dans son corsage ou sous son jupon, afin de les couver à la chaleur de son corps. Bien des Cévenoles ont conservé cette méthode ancestrale, bien qu’elle soit proscrite par les manuels et malgré la commercialisation de couveuses artificielles. Parmi ces dernières, le castelet des Cévennes, apparu à la fin du XVIIIe siècle et ainsi nommé parce qu’il a la forme d’un petit château, est constitué d’une structure à double paroi de fer blanc remplie d’eau, supportant des petits tiroirs contenant la graine. La température souhaitée pour provoquer l’éclosion (23 °C) est obtenue progressivement au moyen d’une lampe à alcool placée sous la couveuse.
Armoire figurée
Le décor de cette armoire en noyer de la seconde moitié du XVIIe siècle illustre l’épisode biblique de « Suzanne et les vieillards », qui a inspiré de nombreux artistes au fil des siècles. Par leur volume comme par leur décor et leur facture, ces armoires figurées du XVIIe siècle, spécifiques au Bas-Languedoc, sont bien représentées dans les Basses Cévennes : région du Vigan et de Saint-Hippolyte-du-Fort ou encore Anduze et Saint-Jean-du-Gard mais également autour de Nîmes. Meubles de notables, elles ont des proportions carrées (environ 2 m x 2 m).
Dans le monde domestique, les armoires n’existent pas avant le XVIIe siècle. Les familles ont des coffres dans lesquels sont rangés le linge de maison et les dots de mariage. Les coffres sont par la suite remplacés par les armoires, plus pratiques, et relégués au grenier comme coffres à grain.
Vannerie en paille de seigle
On confectionne avec la paille de seigle et de l’écorce de ronce ou de noisetier, des vanneries de type spiralé. Il s’agit de paniers de formes et dimensions variées qui portent le nom générique de paihassons. Ils ont différentes fonctions selon leur forme : faire lever la pâte à pain, recueillir les grains vannés, stocker les céréales, châtaignes et légumes secs mais aussi capturer les essaims d’abeilles. La paille de seigle servait aussi à confectionner l’assise des chaises.
Pressoir
Les vendanges se déroulent de fin septembre à mi-octobre, avant la cueillette des châtaignes. Hommes et femmes du quartier y participent ensemble. La récolte est apportée au mas où elle est foulée aux pieds dans des cuves de bois. Dans les Basses Cévennes, les raisins sont écrasés à l’aide de fouloirs à rouleaux, en bois clouté ou en fonte, qu’on installe dans la cuisine. Une trappe permet à la pulpe et à la rafle de couler directement dans la cuve. La fermentation se fait dans une grande cuve. Une fois celle-ci achevée, on soutire le jus qui, mis en tonneaux, donnera le vin. En ajoutant de l’eau et un peu de sucre au marc restant dans la cuve, on entraîne une nouvelle fermentation qui produit la « piquette ». Cette boisson ne se conservant pas, elle est bue en premier.
Les fermentations terminées, on va exprimer le jus qui reste dans le marc au moyen d’un pressoir à vis centrale, de bois ou de fer, la prence. On obtient alors le vin de presse, très noir et très chargé en tanin. Fouloirs et pressoirs sont souvent communs à plusieurs exploitations.
Boîte de graines de vers à soie
Suite à l’apparition de la pébrine, l’usage du microscope, préconisé par Pasteur, permet la sélection des pontes saines de bombyx. Très rapidement, des sériciculteurs se spécialisent dans ce grainage. Les œufs de bombyx sont expédiés directement aux éducateurs, dans des boîtes en carton.
Miroir huguenot
Après la révocation de l’édit de Nantes en 1685, la pratique de la religion réformée est interdite dans le royaume de France. Les protestants restés en France pratiquent dès lors leur religion dans le plus grand secret, et ce, malgré les peines encourues (galère perpétuelle, prison, etc.). Par crainte des visites de contrôle effectuées par les dragons du roi, ils dissimulent tout objet pouvant trahir leur pratique du culte réformé. Le miroir dit « huguenot » a pu constituer, dans son épaisseur, une cachette pour les livres interdits tels que bibles et psautiers.